Ces dernières années on a assisté au développement urbain des villes oasiens. Or, les plans d’aménagements proposés répondent, plutôt, aux modèles qui ont été conçus avec d’autres contraintes et situations. Afin de donner une réponse il sera intéressant d’étudier l’évolution qui ont suivi avec une certaine naturalité l’urbanisme oasien.
Lors de la visite de l’École Nationale d’Architecture de Tétouan de 2013, les autorités nous ont proposé de travailler sur le ksar d’Amezrou, car son évolution pouvaient nous aider à mieux comprendre les atouts de l’urbanisme dans le Sud.
On a établi une hypothèse sur les successives extensions qui a pu avoir le ksar et sa relation avec la palmeraie.
La manque de recherches archéologiques montrent le besoin de travailler avec le CERKAS afin d’avoir une méthodologie de travaille qui nous permette de faire une datation des constructions en terre.
Bien si l’on parle d’un bâtiment bien défini comme ksar, on peut pas nier avec certitude qu’il n’y ait pas un autre noyau plus ancien à l’intérieur du ksar. Mais encore une fois, si l’on ne fait pas des fouilles archéologiques, on ne pourra pas l’affirmer.
Ce que l’on peut constater, c’est qu’il y a un bâtiment avec deux structures intérieurs claires.
Est-ce que la topographie est la cause de cette différence d’espaces?
Selon les photographies aériennes anciennes et les témoignages oraux et écrits que Antoine Bouillon a pu recueillir, le ksar occupait cette surface jusqu’aux années cinquante.
Pendant les années cinquante et soixante, les terrains utilisés pour les familles nomades au bord de la palmeraie, ont commencé à être construits, au même temps que d’autres maisons étaient collées au ksar. Il est curieux de voir comment au four et à mesure que les extensions se succédaient l’espace publique gagnait de l’amplitude tout en gardent la structure de l’espace urbain, c’est à dire, une ruelle et des impasses perpendiculaires, de telle manière que l’échelle de la trame était plus proche de celle des médinas et non pas des ksour.
Déjà à cette époque, la préséance des dunes dans la palmeraie était préoccupante.
Quelques années plus tard, les nouvelles maisons commençaient à suivre une autre trame, en exerçant une “pression” sur la palmeraie et aussi sur la route.
Des nouvelles maisons ont été construites de l’autre côté de la rue et en remplissant l’espace entre la route et la palmeraie, avec une trame plus impersonnelle, qui ressemble plutôt n’importe quelle ville. Actuellement ont trouve une palmeraie qui est sur le point d’être coupée, à cause de l’expansion urbanistique et de l'avancement des dunes.
Bien si l’on considère l’urbanisme comme un problème qui met en péril les écosystèmes, il est aussi possible d’utiliser l’urbanisme comme un instrument pour résoudre certains problèmes.
Dans la palmeraie d’Amezrou, on a essayé de stabiliser les dunes avec des bâtons en bois et des filets, avec des plaques ondulées de fibrociment et dernièrement avec des branches de palmiers. Tous ces systèmes ont du mal à retenir le sable.
Or, si l’on regarde le lieu, on trouve des solutions, qui ne sont plus celles des ingénieurs agronomes, mais qui donnent des résultats optimaux. Des maisons qui sont des barrières. Pourrait-on réfléchir aux barrières contre les dunes avec une mentalité d’architecte? Les étudiants des Écoles d’Architecture de Rabat et Tétouan, Inssaf Bourhim, Najlae Chairich et Elvis Osey ont travaillé dans ce sens, afin d’utiliser l’urbanisme comme instrument de lutte contre la désertification.
La désertification est un enjeu majeur dans les régions désertiques puisqu’il menace des villes entières. Dans le cas d’Amezrou, les dunes viennent du sud-ouest, grâce à l’action du vent.
Le type de dune se correspond avec les barkhanes.
Il est fondamental de faire un suive et analyse du comportement des dunes. Normalement la monitorisation des dunes se fait avec des images aériennes et avec des stations sur place qui mesurent la forme, la position, la vitesse du vent et toute une série de paramètres qui, par la suite, permettront de proposer des solutions. Malheureusement sur cette région il n’y a pas des données.
Des recherches approfondies ont été faites sur la région de Laâyoune, afin d’étudier la forme géométrie des dunes et ses mouvements. La forme de ces dunes, est très similaire à celle des dunes qui s’approchent à Amezrou.
Mais le sable a une autre manière de se déplacer, avec le vent. On a eu des réunions avec des chercheurs espagnols d’une École de Génie des Télécommunications à Madrid. Ils proposaient l’utilisation de nano-émetteurs qui pourraient se déplacer aussi comme le sable, avec le vent. L’information pourrait être plus fiable et en temps réel. Marsad Drâa proposera cette recherche au Haut Commissariat des Eaux et Forêts.
Avec les données qu’il y a, c’est à dire, avec la direction du vent et la forme des dunes, les étudiants ont formulé une hypothèse.
Créer des barrières contre les dunes avec des constructions habitables en terre, pour cela, il va falloir que les bâtiments s’adaptent à la forme de la dune.
Avec cette hypothèse, on essayera d’arrêter l’avancement de dunes.
On plaçant les bâtiments d’une façon stratégique.
Afin de contenir le sable, mais aussi de reboiser la palmeraie.
En créant des nouvelles parcelles, mieux adaptées aux besoins de l’agriculture oasienne et compris le système d’arrosage approprié, selon les recommandations de l’Institut National de la Recherche Agronomique.
Par ailleurs, des murs en terre seront utilisés au delà du fleuve.
Pour la construction des maisons et de la muraille, on utilisera aussi le sable qui se trouve dans la parcelle.
Les étudiants ils ont aussi évoqué un système de récupération de sable, lors de l’impact provoqué par le vent.
Il est vrai qu’une proposition qu’envisage la construction des maisons dans la palmeraie, peut être contradictoire par rapport à la préservation de la palmeraie, étant donné qu’à Zagora il est interdit de construire des maisons dans la palmeraie.
Mais il y a d’autres régions au Maroc, où les gens habitent dans des maisons individuelles à l’intérieur des oasis. C’est l’exemple de l’oasis de Tighmert, dans la province de Guelmim. Bien évidement les contraintes sociologiques et même historiques (dans cette province le seul ksar important est celui d’Assa) sont différentes, mais on pourrait apprendre de cette situation.
En tout cas, dans la vallée du Drâa, les tribus habitaient, normalement, dans les ksour qui se trouvaient, dans la plus part, à l’intérieur de la palmeraie. Réfléchir comment construire des logements collectifs dans les oasis, nous oblige à étudier les ksour et en particulière celui d’Amezrou. En 2013 Ahmed Chahid a proposé aux étudiants de l’ENA Tétouan de travailler sur ce ksar, puisqu’il est toujours habité et aussi parce qu’il a eu des extensions qui pouvaient nous aider à proposer des nouveaux quartiers et des nouveaux logements, basés sur les racines de la vallée du Drâa. Pendant une semaine on a essayé d’établir une chronologie des différentes étapes, mais sans l’intervention des archéologues, il est difficile de vérifier les hypothèses que nous avons établi. D’ailleurs, il sera une des priorités de la recherche du patrimoine en terre, développer une méthodologie de travail des archéologues, des historiens et des architectes, adaptée à la construction en terre. C’est aussi l’avis du directeur du CERKAS (qui s’occupe de la conservation et réhabilitation du patrimoine architectural des zones atlantiques et sub-atlantiques), Mohamed Boussalah. Ce que nous avons constaté est une évolution de l’espace publique du ksar vers une échelle plus proche de celles des médinas, avec des rues piétonnes, protégées du vent dominant et des maisons construites en terre, mais avec une autre distribution. Dès que les extensions ont “dépassé” les dimensions du ksar, la trame urbaine est devenue une trame impersonnelle, comme celle de n’importe quelle ville.
Les étudiants ont comparé quelques ksour, Tinejdad, Amezrou, Beni Zoli... et ils ont proposé une structure spatiale similaire mais adaptée à la forme du bâtiment, bâtiment qui s’adaptait à la forme des barkhanes.
Ils ont travaillé l’organisation intérieure du bâtiment, le rapport avec les “nouvelles” parcelles agricoles de l’oasis, la production et distribution communautaire d’énergie (tel que les habitants font avec l’eau), la protection contre le sable... On pourrait dire qu’il s’agit d’un ksar contemporain.
Que l’image finale ne soit pas normale, ne doit pas dire qu’il ne s’agisse pas d’un bâtiment issu de la palmeraie.
Ou que l’urbanisme résultant ne soit pas un urbanisme oasien.
Les auteurs du projet, Inssaf Bourhim, Najlae Chairich et Elvis Osey (encadrés par Carlos Perez Marín) vont continuer à développer la conceptions des logements, dès un point de vue social et constructif.
Pourrions-nous, vraiment, parler de l’existence d’un urbanisme oasien? Dans la vallée du Drâa il y a actuellement un grand défi à cause du développement des centres émergents. Est-il compatible avec les écosystèmes de la vallée?
À Beni Zoli, comme à Tinzouline, Tammegroute... cette question a été déjà posée et même répondue avec des plans d’aménagements.
Si l’on regarde l’évolution qui a suivi Beni Zoli, on voit comment auparavant, les habitants se logeaient dans les ksour, qui étaient dans la palmeraie.
Aujourd’hui, la superficie de la palmeraie est en régression est celle de la ville en augmentation.
Mais avec le projet d’aménagement actuelle, la ville va continuer à s’étendre, au détriment de la palmeraie.
Peut-être, dans quelques années, si les constructions ne sont pas contrôlées, la situation pourra être encore plus délicate.
Il est essentiel de réfléchir avant de faire un plan d’urbanisme, sur le type de ville que vous voulez (en sachant les contraintes des villes oasiennes). Parfois il y a des questions très simples. Voulez-vous une ville avec une palmeraie? Ou...
Une palmeraie avec une ville. Malgré la ressemblance des phrases, la différence est énorme et même s’il paraît une utopie, c’était le mode de vie de la vallée, et qui maintenant est en train de disparaître.
Un des problèmes est que les nouveaux plans d’aménagement considèrent les centres émergents comme des villes urbaines, sans tenir en compte la présence de la palmeraie et leurs modes de vie (liés à l’agriculture dans les oasis).
Si l’on continue à faire des plans d’urbanisme de cette façon, on arrivera à avoir des villes comme celles du Mexique.
En créant des quartiers hors d’échelle et sans s’adapter aux contraintes climatologiques.
ou bien considérer la palmeraie comme si la ville aurait été toujours à l'intérieur
Pour bien mener un projet de ce type, il faut, d’abord, faire de la recherche avec des équipes multidisciplinaires, puisque les architectes et les ingénieurs ne seront les seuls à “concevoir” ces nouvelles villes oasiennes. Il faudra travailler, au même niveau d’importance, avec des professionnelles de l’agronomie, de la géologie, de la génie hydraulique, électrique, de la sociologie, de l’histoire, de l’archéologie...
Avec Marsad Drâa, on propose aux spécialistes qui travaillent de façon indépendante, de partager les recherches et de les affronter avec des équipes multidisciplinaires, afin de résoudre des problèmes dans les régions désertiques, mais aussi de faire des expériments qui puissent s’appliquer au Sud, mais aussi dans les villes du Nord.